Banques alimentaires : « Le lien avec les collectivités est essentiel »

Par Isabelle Raynaud. Dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, les collectivités locales sont « des partenaires très importants », affirme Jacques Bailet, le président du réseau des Banques alimentaires.

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Lutte contre le gaspillage alimentaire : une opération gagnante pour les collectivités voir le sommaire

Regrettez-vous la censure par le Conseil constitutionnel de l’amendement contre le gaspillage alimentaire du texte sur la transition énergétique ?

Jacques Bailet. De façon pratico-pratique, la censure du Conseil constitutionnel ne change rien. La grande distribution est notre principal donneur. En 2014, sur 100 000 tonnes distribuées, 35 000 proviennent de la grande distribution. C’était en augmentation de 10% par rapport à 2013.

Et, sur les six premiers mois de l’année 2015, les dons de la grande distribution ont augmenté de 10% par rapport à la même période de 2014. Le partenariat que nous avons avec la grande distribution est donc stratégique.

La proposition de loi qui doit être portée par Guillaume Garot, reprenant le texte censuré par le Conseil constitutionnel est-elle du coup importante pour vous ?

J. B. L’apport de ce texte est qu’il renforce l’intérêt sur le gaspillage alimentaire. Ce qui a été fait, la convention signée entre la grande distribution et la ministre de l’Environnement Ségolène Royal, est une bonne façon de rebondir après l’échec de l’amendement.

Mais si on accroît le produit de la collecte, il va falloir plus de gens et des moyens supplémentaires pour ramasser les denrées. Il faut, avec tous les acteurs, se donner un moyen et définir les moyens que l’on met.

© @BanquesAlim

Les 79 banques alimentaires distribuent près de 15 000 tonnes de denrées via les centres communaux d’action sociale (CCAS). Cela représente 30 millions de repas, soit 15% des denrées distribuées”

 

Parmi ces acteurs, quelle place occupent les collectivités locales ?

J. B. Les collectivités sont pour nous des partenaires très importants. D’abord car les 79 banques alimentaires distribuent près de 15 000 tonnes de denrées via les centres communaux d’action sociale (CCAS). Cela représente 30 millions de repas, soit 15% des denrées distribuées. Institutionnellement, les collectivités territoriales sont des partenaires, le lien est essentiel.

Nous développons aussi des partenariats financiers avec les collectivités : conseils départementaux, villes et certaines régions supportent l’action des banques alimentaires. Beaucoup de collectivités voient l’importance de l’accompagnement alimentaire. Malgré les contraintes budgétaires sérieuses actuellement, l’aide qui est versée est sacralisée.

Notre mode d’intervention est extrêmement efficace. Nous n’achetons aucune denrée et nous travaillons majoritairement avec des bénévoles. L’argent donné nous sert à acheter des camions et camions frigorifiques, payer pour les locaux, le fioul… Lorsqu’on met 1 euro dans les banques alimentaires, ça permet donc de distribuer 8 euros de marchandises.

Il est beaucoup plus efficient de donner 10 euros à une banque alimentaire qu’à un bénéficiaire. Dans un monde financièrement tendu, c’est très parlant et efficace en matière de gestion des deniers publics.

© @BanquesAlim

Dans le cahier des charges, lorsque la collectivité choisit son prestataire, il faut éviter de surproduire et ensuite prévoir de récupérer les denrées qui sont excédentaires.”

 

Comment aider les collectivités territoriales à moins gaspiller ?

J. B. Nous avons des partenariats sur la pédagogie à faire auprès des enfants et adolescents. Nous avons l’agrément « d’association éducative complémentaire de l’enseignement public », accordé par le ministère de l’Education nationale. Cela nous permet d’aller dans les écoles pour donner des conseils sur la nutrition et comment éviter le gaspillage. Sur ce dernier point, il y a un besoin d’éducation du consommateur et plus on s’y prend en amont, mieux c’est.

Il y a également un gisement de lutte contre le gaspillage alimentaire au niveau des cantines des collectivités territoriales : aussi bien au niveau scolaire que dans les cantines pour les fonctionnaires territoriaux.

C’est une source de denrées qu’il faut pouvoir récupérer. Pour cela, il faut prendre les choses le plus en amont possible : dans le cahier des charges, lorsque la collectivité choisit son prestataire, il faut éviter de surproduire et ensuite prévoir de récupérer les denrées qui sont excédentaires.